Jeune patient de 25 ans, sportif de haut niveau (ski et sports d'endurance), ayant bénéficié d'une chirurgie cardiaque (Tirone David’s) dans le cadre d'une bicuspidie aortique; l'intervention s'est compliquée de la survenue d'un bloc auriculo-ventriculaire complet et permanent; le patient a bénéficié de l'implantation d'un stimulateur triple chambre VIVA CRT-P par voie chirurgicale épicardique; après 3 semaines de réadaptation, il a repris une activité sportive progressive qui s'est accompagnée d'une symptomatologie invalidante; en effet, une dyspnée apparait subitement en récupération d'efforts importants avec sensation de ralentissement brutal de sa fréquence cardiaque confirmé par son cardiofréquencemètre; ce ralentissement de fréquence pouvait durer plusieurs minutes voire une heure après l'arrêt de l'effort.
Une épreuve d'effort sur vélo est alors réalisée; les seuils de stimulation sont excellents pour les 3 sondes; la programmation retrouve une fréquence maximale synchrone à 190 battements/minute, un délai AV adaptable (100-70 ms) et une PRAPV programmée sur Auto (valeur minimale 200 ms).ce patient atteint 300 Watts avec augmentation régulière et adaptée de sa fréquence cardiaque et 100% de cycles AS-BV (détection atriale, stimulation biventriculaire); en récupération, le patient ressent ses symptômes habituels avec enregistrement sur l'électrocardiogramme d'un aspect de bloc 2/1 et chute brutale de la fréquence cardiaque qui est divisée par 2 (de 132 bpm à 66 bpm); l'interrogation du stimulateur est réalisée 15 minutes plus tard avec persistance d'un bloc 2/1 sur l'électrocardiogramme;
- l'EGM confirme le bloc 2/1 avec cycles répétitifs AS-BV-AR, une activité atriale sur 2 tombant dans la PRAPV et n'étant pas suivie d'une stimulation biventriculaire; visuellement la PRAPV dure plus de 400 ms;
La PRAPV Auto est déprogrammée et modifiée en PRAPV fixe avec la valeur la plus courte autorisée; en effet, le patient étant en BAV antérograde et rétrograde au repos comme à l'effort, son risque de TRE pouvait être considéré comme nul; l'absence d'enregistrement de l'EGM au moment où le fonctionnement 2/1 a débuté ne permet pas de déterminer la cause initiale du problème.
A son retour au domicile, le patient reprend une activité sportive importante; il ressent de nouveau une symptomatologie en récupération avec une baisse de fréquence confirmée par son cardiofréquencemètre mais de durée beaucoup plus courte (quelques secondes à 1 ou 2 minutes); une seconde épreuve d'effort est réalisée avec enregistrement simultané des EGM endocavitaires; en récupération, la symptomatologie réapparait contemporaine d'une baisse brutale de la fréquence cardiaque.
- initialement détection atriale suivie d'une stimulation biventriculaire;
- surdétection de la fin du complexe QRS ou du début de l'onde T; l'onde P qui suit tombe dans le blanking atrial post-stimulation ventriculaire (programmé sur partiel) et n'est donc pas suivie d'une stimulation ventriculaire;
- persistance de la surdétection et aspect de bloc 2/1;
Le blanking ventriculaire post-stimulation ventriculaire est allongé de 200 à 250 ms; la symptomatologie reprend avec baisse de la fréquence cardiaque moins marquée;
- surdétection de l'onde T; l'onde P qui suit tombe dans le blanking atrial post-stimulation ventriculaire et n'est donc pas suivie d'une stimulation ventriculaire;
- existence d'une onde P non suivie tous les 4 à 5 complexes; une baisse de la sensibilité ventriculaire de 0.9 mV à 2.8 mV a été nécessaire pour supprimer toute surdétection; la survenue de quelques extrasystoles ventriculaires ont permis de vérifier une détection correcte des activités ventriculaires spontanées à ce niveau de détection ventriculaire.
Ce cas clinique illustre une cause inhabituelle de déclenchement d'un bloc 2/1 à l'effort mais surtout l'entretien prolongé de ce phénomène en raison des spécificités du fonctionnement de la PRAPV automatique. Différentes causes doivent être recherchées en présence d'une baisse brutale de la fréquence cardiaque à l'effort chez un patient dépendant resynchronisé: très improbable perte de capture des 2 sondes, sous-détection atriale qui est probablement la cause la plus fréquente et fonctionnement 2/1 en raison d'une période réfractaire atriale totale trop longue. Ce cas clinique met en évidence une cause plus rare de chute de fréquence à l'effort: surdétection par la sonde ventriculaire droite avec double comptage de l'onde R et/ou surdétection de l'onde T probablement favorisée par l'implantation d'une sonde bipolaire épicardique cousue (plus d'espacement entre les électrodes). Chez ce patient, la surdétection initie le problème qui va être entretenu pendant plusieurs minutes du fait de la programmation de la PRAPV automatique. La durée de la PRAPV s'adapte en fonction de la fréquence cardiaque: PRAPV longue quand la fréquence est lente pour réduire le risque de TRE, raccourcissement quand la fréquence s'accélère pour repousser le point de 2/1. Le dispositif calcule la fréquence cardiaque à partir de la médiane des 12 derniers cycles ventriculaires. La surdétection génère une chute brutale de la fréquence ventriculaire et donc un allongement de la PRAPV alors que le rythme sinusal reste rapide expliquant la persistance du phénomène de bloc 2/1 même après l'arrêt de la surdétection. L'inadaptation du débit cardiaque génère de surcroit une tachycardie sinusale prolongée qui entretient le phénomène, ce qui explique que le bloc 2/1 persiste plusieurs minutes après l'arrêt de l'effort.
La déprogrammation de la PRAPV Auto ainsi qu'une baisse de la sensibilité ventriculaire ont permis de régler le problème du démarrage (surdétection) et d'entretien (PVARP auto) du bloc 2/1. La programmation d'une PRAPV la plus courte possible peut être réalisée chez ce patient dépendant, sans conduction antérograde ou rétrograde, sans majorer le risque de TRE.