TRE sur écoute croisée; diagnostic par télémédecine

Tracé
N° 13
Constructeur Biotronik Prothèse PM Chapitre DAV, TRE, périodes réfractaires
Patient

Femme de 78 ans porteuse d’un stimulateur double chambre Evia DR-T; message d’alerte télémédecine (jaune) pour fréquence ventriculaire élevée; convocation de la patiente qui présente à l’arrivée des signes d’insuffisance cardiaque. 

Tracé

Tracé 13a

  1. alerte jaune pour fréquence ventriculaire moyenne supérieure à la limite (> 100 bpm);
  2. le rapport de télémédecine montre une augmentation brutale du pourcentage de stimulation ventriculaire (de 0 à 100%) et une augmentation subite de la fréquence atriale et de la fréquence ventriculaire (fréquence égale à 116 bpm);

Tracé 3b

A l’entrée enregistrement du tracé avec 3 dérivations électrocardiographiques, le canal auriculaire et le canal ventriculaire;

  1. stimulation atriale et stimulation ventriculaire avec probable capture atriale et ventriculaire;
  2. probable écoute croisée; l’EGM atrial montre un signal détecté dans l’oreillette en dehors des périodes réfractaires (AS) correspondant probablement à la dépolarisation ventriculaire suivant la stimulation;
  3. le signal étant classé AS, il est suivi d’un délai AV et d’une stimulation ventriculaire;
  4. nouvelle écoute croisée mais le signal est cette fois détecté dans la période Far Field (pas de délai AV synchronisé sur ce signal);
  5. probable conduction rétrograde avec cycle atrial classé AS générant un délai AV;
  6. probable TRE avec succession de cycles AS-VP et intervalles VP-AS fixes; la sonde atriale est positionnée dans l’auricule (partie haute de l’oreillette) ce qui explique que la détection de l’activité atriale soit tardive (dépolarisation en provenance de la partie basse de l’oreillette); le délai réel entre oreillette et stimulation ventriculaire est plus long que ce que suggère le délai AV court, ce qui explique la possibilité d’une conduction rétrograde (oreillette basse sortie de ses périodes réfractaires) et d’une TRE;
  7. après 8 cycles consécutifs, suspicion de TRE; le dispositif rallonge le délai AV de 50 ms;
  8. malgré ce changement de délai AV, l’intervalle VA reste fixe : diagnostic de TRE;
  9. allongement de la PRAPV sur un cycle; la conduction rétrograde est détectée dans la PRAPV; pas de délai AV et interruption de la tachycardie;
  10. reproduction perpétuelle à l’identique de la même séquence.

Tracé 13c

  1. test de conduction rétrograde réalisé en mode VDI à 90 bpm; conduction rétrograde présente avec activité atriale détectée dans la PRAPV; intervalles VA relativement fixes.
Commentaires

Le démarrage d’une tachycardie par réentrée électronique (TRE) implique la programmation d'un mode de suivi atrial (DDD ou VDD), la perméabilité de la conduction rétrograde et une perte momentanée ou permanente de la synchronisation atrio-ventriculaire. En effet, si l’activité ventriculaire est correctement synchronisée à celle de l’oreillette, la conduction rétrograde est bloquée. L’entretien de la TRE résulte de la détection hors périodes réfractaires d’une onde P' rétrograde qui entraine le déclenchement d'un délai AV souvent allongé, qui favorise de nouveau la conduction rétrograde après stimulation ventriculaire. Une TRE est donc une séquence répétitive dans laquelle le stimulateur réagit à chaque onde P rétrograde en stimulant le ventricule à une fréquence élevée qui à son tour génère une onde P rétrograde.

Le cycle se répète ainsi indéfiniment à moins de l'apparition d'un bloc rétrograde ou de l'intervention d'un algorithme spécifique. Une TRE de durée prolongée peut être mal supportée avec une symptomatologie allant de la simple sensation de mal être ou de palpitations jusqu'à la décompensation cardiaque chez les patients présentant une cardiopathie sous-jacente. La fréquence d'une TRE dépend du temps de conduction rétrograde, de la fréquence maximale programmée et du délai AV en cours.

Ce tracé montre les spécificités des dispositifs BiotronikTM dans la gestion des TRE :

  1. une des spécificités des stimulateurs BiotronikTM est de proposer la mesure du temps de conduction rétrograde pour adapter la programmation de la PRAPV. Le test de conduction rétrograde est réalisé en mode VDI (fréquence programmable qui doit dépasser le rythme spontané du patient). Les 5 premiers cycles ne sont pas analysés. Le dispositif confirme l’existence d’une conduction rétrograde quand il existe un rapport 1/1 entre oreillettes spontanées et ventricules stimulés et quand l’intervalle VA est jugé constant. Trois valeurs de conduction rétrograde sont fournies : valeur minimale de l’intervalle VA, valeur maximale et valeur moyenne. Si ces 3 valeurs ne diffèrent pas de plus de 25 ms (comme chez cette patiente), l’existence d’une conduction rétrograde est suspectée.
  2. le dispositif suspecte l’existence d’une TRE si la fréquence cardiaque dépasse 100 battements/minute, l’intervalle VA (VP-AS) est plus court que l’intervalle VA programmé (valeur nominale de 350 ms, programmable entre 250 et 500 ms) pendant 8 cycles consécutifs et les intervalles VA sont stables (+/-25 ms).
  3. le dispositif confirme le diagnostic de TRE en modifiant le délai AV sur un cycle (allongement de 50 ms sur ce tracé) et en analysant la durée du cycle VA suivant; si la durée de l'intervalle VA est raccourcie, cela implique que l'intervalle AA n'a pas été impacté par la modification du délai AV ce qui est en faveur du diagnostic de tachycardie sinusale; à l'inverse, si cet intervalle VA n'est pas modifié, cela implique que l'activité atriale est dépendante de la stimulation ventriculaire qui précède ce qui est faveur du diagnostic de TRE.
  4. le dispositif allonge la PRAPV (critère VA programmé + 50 ms) sur un cycle; l'activité atriale qui suit tombe dans la PRAPV, ne déclenche pas de délai AV ce qui permet d'interrompre la TRE.

Ce tracé souligne également le fait que si le facteur déclenchant de la TRE n’est pas corrigé, les tachycardies peuvent devenir incessantes. Ici la télémédecine a permis un diagnostic rapide avec alerte pour augmentation de la fréquence moyenne ventriculaire. A l’arrivée, la patiente présentait des signes d’insuffisance cardiaque qui se sont rapidement amendés après modification de la programmation et traitement diurétique. Nous avons diminué la sensibilité atriale (augmenté la valeur programmée) pour éviter l’écoute croisée. Allonger la PRAPV au-delà du temps de conduction rétrograde (380 ms) était également possible chez cette patiente aux capacités d’effort très limitées (point de 2/1 relativement bas).

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